Mesurer en tant que PMM : Pour qui, pour quoi, comment ?
26/4/2023
Comment assurer l’impact business maximum d’une offre produit mise sur le marché ? Demandez à un Product Marketing Manager.
Encore nouveau dans les organisations produit Le Product Marketing Manager (PMM) est un rĂ´le en pleine Ă©mergence. Au cĹ“ur de son expertise, il adresse cette question essentielle de l’impact business. Si le Product Manager (PM) a de toute Ă©vidence cet enjeu Ă cĹ“ur lors de la conception de ses produits, il se matĂ©rialise davantage dans son approche customer-centric, en amont. Un produit gĂ©nĂ©rateur de ROI (Return on Investment) est un produit qui rĂ©pond Ă un enjeu utilisateur. Le Product Marketing Manager accompagne cette logique en partageant avec le PM son expertise du marchĂ© et du client cible. Fort de ces insights, il construit ensuite l’offre produit afin de maximiser son impact : son positionnement, ses messages clefs, son prix. Enfin, il est chargĂ© du lancement commercial, le go-to-market et ses campagnes ainsi que de l’analyse des retombĂ©es du produit.Â
        Pour Sébastien Elion, Business Owner chez TF1, le Product Marketing Management c’est « le croisement de différents mondes : la partie business et monétisation, le branding (…) et le product management. Le rôle, c’est avoir la même histoire à raconter à travers ces trois pôles ». Il s’agit donc de concevoir un produit qui corresponde à la promesse de la marque et qui soit monétisable pour répondre aux enjeux business de la marque. Pour Mélanie Raulic, Product Marketing Lead chez Glady, le Product Marketing est le « bras armé du business et du Product. C’est une expertise business (…) responsable d’apporter son produit sur le bon marché en s’assurant d’apporter de la valeur pour que les utilisateurs cibles soient au rendez-vous ». Julie Fritel-Chatard, Product Marketing Lead chez Alma et animatrice de l’échange, est alignée. « Le Product Marketing Manager (PMM) a au cœur de ses missions le lancement des différents produits et leur impact à la fois sur les utilisateurs mais aussi sur le business. C’est également un catalyseur du Product Market Fit et pour s’en assurer, il faut pouvoir mesurer cet impact ».
Sommaire
Pourquoi mesurer : Pour qui ? Pour quoi ?Â
Mesurer est clef pour la fonction de PMM. C’est la donnée recueillie qui va permettre d’abord d’identifier les directions qui s’offrent pour le produit, de soutenir le plan d’action choisi ensuite et l’impact, enfin, des produits qui en découlent … afin d’analyser les leviers d’amélioration, les prochaines opportunités. La mesure va soutenir la prise de décision en luttant contre un biais cognitif répandu en Product, dans les équipes comme parmi les stakeholders, le gut feeling. Animé par l’envie de faire des choses utiles, on peut se prendre à avoir des convictions qu’il est toujours bénéfique de confronter à la réalité utilisateur. Le PMM va tester ses intuitions, valider ses hypothèses avant d’entreprendre les développements et dérisquer la prise de décision. Chez Glady la phase bêta est ainsi systématique.
Il s’agit donc de mesurer pour avancer mais aussi pour convaincre. Les métriques sont « un langage universel » pour Mélanie. « Le quotidien du PMM est d’être force de proposition, de convaincre que son plan d’action est celui qui fonctionnera, alors mesurer permet un alignement avec les stakehodlers, sur une base connue de tous ». C’est aussi ce qui donne confiance aux équipes pour Sebastien, c’est ce qui manifeste qu’« on a fait quelque chose qui est utile pour les utilisateurs et qui est utile pour le business ». Une fois qu’ils ont favorisé la confiance des sponsors et de l’équipe, les résultats mesurés permettent la liberté d’action : « ensuite si on veut faire un truc différent, on peut y aller plus facilement car la mesure sera là pour valider (ou non) la prise d’initiative ».
La mesure est donc l'outil de travail du PMM : identifier les opportunitĂ©s, prendre des dĂ©cisions, convaincre que ce sont les bonnes, instaurer un climat de confiance mais aussi valider la valeur ajoutĂ©e de son rĂ´le mĂŞme, très jeune. « Le Product Marketing est trop souvent vu, encore aujourd’hui, comme un centre de coĂ»t et pas un centre de revenu, or la fonction a un ROI très fort ».Â
Quelles mesures ?
KPI business – quantitatif
Toutes les actions menées par le PMM ont un objectif de retour sur investissement. Dans la boîte à outils du PMM, on retrouve des métriques phares Le nombre de leads et clients
- Les leads générés et perdus qui, combinés, donnent le win/loss ratio
- Le coût d’acquisition du client contre la valeur générée - un ratio à respecter est fourni par la finance
- Le CAC - le coût d’acquisition client : le budget marketing dépensé divisé par le nombre d’utilisateurs acquis par l’opération
- La LTV – Lifetime Value : la valeur que représente un client dans le temps. Attention, plus elle est mesurée sur le long terme, plus la donnée est risquée en prédictif. Sébastien recommande par exemple une valeur projetée sur un an, en se calquant sur le modèle de l’abonnement
- ARPU – La moyenne du revenu moyen généré par les utilisateurs, le panier moyen
- Churn – Sur une période donnée, c’est le calcul du taux d’utilisateurs qui vont quitter notre base clients. Cette mesure s’oppose aux taux de rétention.
Si la partie marketing se focalise davantage sur le haut de funnel (acquisition), la partie product aura une vision plutôt full funnel avec différents types de campagne : acquisition, engagement, activation, rétention. Alors on va viser des métriques différentes, selon les actions product marketing engagées.
Mesurer l’adoption utilisateur - la rencontre du quali et du quanti
Le PMM comme le PM visent à offrir un produit utile à leurs utilisateurs et générateur d’impact business. La mesure de l’adoption est donc particulièrement importante pour lui. Comment la mesurer ?
Le Net Promoter Score évalue la satisfaction au lancement d’une nouvelle feature, d’un nouveau produit en récoltant auprès des utilisateurs leur propension à le recommander.
Le ratio de découverte de la nouveauté : combien de personnes ont découvert la fonctionnalité ? Combien l’ont ensuite utilisée ? et ce en faisant ce que l’on attendait ?
Quels sont les usages faits de mon produit ? Ils sont mesurables par :
- Le taux de visites uniques
- Le nombre d’actions exécutées par session
- Le nombre de passages d’interfaces
- La cohérence avec le parcours utilisateur imaginé initialement et le taux d’abandon
Il s’agit alors de définir l’adoption visée afin de pouvoir la comparer avec la donnée et d’identifier les actions à mettre en place en fonction de l’évolution souhaitée. Est-ce que je vise une visite à un moment précis, ou plutôt la répétition des visites ? A quelle fréquence ?
 Mesurer le qualitatif : De l’importance de la relation aux salesÂ
La récolte de données a des sources multiples et nos intervenants portent une attention toute particulière à la collecte de données issues des sales. Plusieurs techniques s’offrent au PMM pour recueillir ces insights. Participer aux rendez-vous client, dans un cadre B2B comme B2C, est riche d’enseignements, voire indispensable. « Être au plus près du marché pour s’en imprégner au maximum et apporter cette connaissance aussi au regard des concurrents et de l’offre produit existante ». Et c’est également possible en asynchrone grâce à l’enregistrement des appels passés, notamment grâce à l’outil Modjo. Cela permet au PMM d’estimer l’impact du discours sales, d’analyser les réactions des clients au produit comme au propos, qu’elles soient physiques ou verbales. Cela lui permet de recueillir les objections des utilisateurs et ces feedbacks vont enrichir ses prochains outputs, la construction de son offre, de ses messages clefs et faire évoluer son produit. Attention toutefois à assurer sa position. L’objectif n’est pas de juger ou de prendre le lead sur la mission du sales et le communiquer sera important. « C’est quelque chose à vivre ensemble plus qu’une défiance ou une méfiance à créer ». Chez Alma, deux dispositifs sont mis en place. Les collaborateurs sont invités à accompagner les vendeurs sur le terrain, auprès des commerçants indépendants. Ils peuvent également participer à des « in store days », passer une journée avec les commerçants pour discuter, voir comment la solution est utilisée, quelle PLV est mise en place et recueillir du feedback en direct.
Cela permet également au PMM de tirer des enseignements concernant les outils d’aide à la vente auxquels s’adossent les discours des sales. A cette fin, il peut également tracker l’utilisation des supports mis à disposition, qu’il s’agisse de battle cards concurrence, de sales pitches, de supports de formation. Il existe par exemple un métrique Google slides qui partage le nombre de vues, ou encore le feature « analytics » de l’outil Notion qui permet de connaître le nombre de consultations de la documentation. « Si cinq personnes regardent, alors quelque chose a été raté dans la com, ou dans l’intérêt ». On peut également avoir un REX aisément en diffusant une enquête en interne, le NPS sera capté par l’équipe et donnera une vision macro du bon fonctionnement de l’approche et des éléments manquants. C’est notamment ce que Alma a mis en place, sous la forme d’un « sales confidence survey » visant à mesurer l’impact et l’usage des outils de sales enablement. « Ce sont des assets sur lesquels on passe beaucoup de temps ». Chez Glady, un parcours de formation 360° est diffusé aux sales. Par parcours et sujet, il éclaire les appétences des uns et des autres, caractérise les bons process et outils ciblés selon les équipes et besoins.
Comment mesurer ?
 Métriques et objectifs
Toute utilisation d’indicateurs nécessite de les croiser avec des objectifs. Qu’il s’agisse de taux de pénétration, de part de marché ou de développement des usages, plus le produit est mature, plus il est facile d’avoir les bonnes métriques pour accéder aux retours d’audience. Chez TF1, Sébastien part plutôt de la valeur client pour définir ses KPI afin d’identifier la capacité à générer de la valeur avec l’utilisateur recruté et projeter cette valeur dans le temps avec des objectifs de CA. Côté audience, le haut du funnel, il cherche les meilleurs canaux pour atteindre son parc adressable, son taux de pénétration cible et vise les performances de campagnes en amont.
Chez Glady, le mécanisme est d’abord très macro : viser les 2 OKR (Objective, Key Results) principaux de l’entreprise, la croissance et l’engagement. Ces notions sont transposées pour chaque équipe, les OKR généraux deviennent des OKR d’équipe, de métier et individuels. S’ajoute une verticale autour de la maturité du produit. S’il s’agit d’une nouvelle offre plutôt que d’une évolution, des métriques de cross sell et d’adoption s’ajouteront aux KPI business.
Chez TF1, les OKR sont trimestriels et les équipes construisent leur roadmap et définissent leurs sujets sur cette base. Si ces OKR ont toujours été orientés produit, ils sont de plus en plus globaux. Ils permettent de fédérer à travers les différents services ; « ça fait partie des outils qu’on utilise pour rallier tout le monde à la même cause ».
Ces objectifs représentent finalement des prévisions, qu’il ne faut « pas avoir peur de surmonter, en ayant en tête les 75%, 100% et 125% pour se motiver ». Si les performances ne sont pas celles attendues, alors l’itératif est de mise. Il s’agit de s’aligner avec l’équipe produit pour décider si ces retours feront l’objet d’une réflexion ultérieure ou si l’objectif est de rebondir tout de suite. L’enjeu sera ensuite de trouver un compromis entre les attentes sales et marketing et la faisabilité côté produit. PM et PMM définissent ce qu’il est possible de faire pour atteindre l’objectif fixé, découpent et priorisent les solutions.
Gestion de la donnée
Sébastien, chez TF1, travaille avec une multitude de sources de données. Elles sont stockées brutes dans un Data Lake et les équipes sont accompagnées par des data analystes. Ils sont chargés d’exposer, de croiser, d’analyser ces données sous forme d’indicateurs dans différents dashboards de performance articulés autour du cycle de vie utilisateur. La manière dont cette data est travaillée vise à « suivre la performance d’une offre de bout en bout : quelle valeur est apportée par ces clients, est-ce que c’est cohérent avec le coût ? ». La structure est similaire chez Alma, tant pour le CRM que les données d’utilisation. Chez Glady, aujourd’hui, ce sont des dashboards Excel qui sont utilisés et la collecte et la centralisation de la donnée représentent un véritable enjeu. Mélanie peut compter sur des ops pour assurer la gestion de cette data, de sa collecte à sa maintenance. En ce qui concerne la partie expérience, Glady utilise Amplitude.
Quels freins rencontrent les PMM ?
Pour autant, « c’est important de se dire que ce n’est pas une course à la data ». De la même manière qu’un indicateur se lit en fonction d’un objectif, la collecte de data est mappée avec un objectif stratégique. C’est l’un des freins que peut rencontrer le PMM : faire naître de la complexité une fois noyé sous la donnée. Tout est mesurable aujourd’hui, mais cela nécessite des ressources humaines et du temps afin de collecter la donnée, l’exploiter et utiliser les outils, les faire communiquer entre eux, pour avoir la bonne data, cohérente afin de soutenir la prise de décision.
Mesurer a ainsi un coût financier fort. Il requiert un investissement humain et en outils. Le choix même de ces outils parmi la multitude de l’offre est un challenge en soi. « On va souvent choisir celui qui va résonner le plus mais, souvent, il sera trop gros. Est-ce que j’ai besoin d’une Ferrari ou d’un tracteur ? ». Tout dépend de ma maturité et, éternellement, de la stratégie retenue.
Une autre résistance que le PMM peut rencontrer est inhérente à la nature humaine. « On va inventer cette histoire d’amour pour qu’il y ait match entre utilisateur et produit, on va réfléchir au plan de com, on va évangéliser ». Il peut être nécessaire de faire un pas en arrière et de se demander quelle métrique on a bougé pour ne pas perdre la valeur des actions réalisées. Mélanie recommande ainsi des points récurrents pour se recentrer sur ce qui a été décidé initialement : quelles mesures ont été sélectionnées afin de prouver que le plan d’action allait fonctionner, qu’est-ce que j’attends de ce plan ?
Le mot de la fin
MĂ©lanie
- Pourquoi mesurer ? Pour valider ses actions et avoir un réel REX sur ce que l’on fait au quotidien
- Ne pas avoir peur du manque de data, commencer petit avec des surveys, des choses facilement actionnables et surtout mapper la data – objectifs - usage pour donner de la légitimité à ces data
SĂ©bastien
- En tant que PMM, on est un peu le lien entre le marché et ce qui se passe en interne, côté produit
- On baigne dans la data toute la journĂ©e. Elle est donc importante pour tout le monde, mais il faut que ce soit de la data pertinente, on ne doit pas ĂŞtre noyĂ© dessous. La data est Ă©galement un levier pour communiquer, transformer les mentalitĂ©s, les usages. Cette data a un vĂ©ritable pouvoir Â
Events passés qui pourraient vous intéresser
Articles
Comment éviter les pièges courants lors de la création de personas utilisateurs
30/10/2024
Des tips activables pour créer des personas efficaces. Évitez les pièges classiques et alignez votre équipe sur le besoin réel de vos utilisateurs.
Rendre un produit plus Ă©co responsable
2/5/2022
Réponse : 3 réflexions à mener au préalable et 5 actions concrètes (quasi) immédiates. On vous explique.
Appliquer le Less Is More Ă ses indicateurs | TAK
24/8/2021
Dans cet article, découvrez grâce à Martin ce que sont des vanity metrics, leur fonctionnement et les “meilleures pratiques” pour les éviter.
Recevez la newsletter des experts Produit
Chaque mois, nous synthétisons les ressources et les inspirations partagées au sein de notre communauté.