Peut-on piloter un Produit par l’impact, sans planning ?

10/2/2022
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En construisant des produits numériques en mode projet, les entreprises ont tendance à construire leur produit avec la même démarche que la planification d’un mariage avec une date, puis un rétroplanning. Mais dans un monde numérique de plus en plus VUCA (Volatility, Uncertainty, Complexity et Ambiguity), est-ce une bonne démarche ? 

Pour d’autres structures, le glissement du mode projet au mode produit, qui place l’utilisateur au centre de la réflexion, a permis de s’adapter au changement plutôt que de suivre un plan. Mais le fait de supprimer tout planning pour prioriser l’impact est-il viable ? Pour apporter un éclairage concret au cœur du réacteur, Florian Zilliox, Product Coach chez TAK, a convié Maxime Champoux, Head of Product chez Qonto et Christopher Parola, VP Product chez Yousign. Un tour de table riche d’enseignements et d’élimination des a priori !

Sommaire


Le focus de Qonto : le Target Cost

Qonto, une des licornes françaises, compte aujourd’hui une centaine de personnes dans l’équipe produit, dont 40 product people. Avec la Qonto way, leur organisation s’inscrit dans une ambition limpide : livrer de la valeur le plus vite possible. Maxime Champoux l’explique ainsi : « Notre objectif est de comprendre comment battre nos compétiteurs en étant plus rapides qu’eux sur la sortie des produits. Ce qui suppose de regarder le lead time au début de la feature, puis de calculer le délai de résultat jusqu’à ce qu’elle soit entre les mains des utilisateurs. »

Pour cela, Qonto s’appuie sur le Target Cost : il s’agit de ne pas prioriser par rapport à l’effort que cela demande, mais au coût maximal de l’investissement.

Plus concrètement, les équipes se donnent 6 semaines pour :

  • Lister toutes les fonctionnalités possibles, afin de rentrer dans le Target Cost de 6 semaines
  • Mesurer les lead times
  • Si cela ne va pas, comprendre pourquoi, itérer, s’améliorer. Une matrice d’analyse permet alors de se poser des questions sur les outils ou les standards à mettre en place.

« Aujourd’hui, nous arrivons à maîtriser la qualité, ce qui nous a amenés à vouloir procéder le plus rapidement possible pour créer l’impact et la valeur. Si bien que maîtriser aussi le temps s’apparente à ce que fait un cuisinier expérimenté qui travaille deux fois plus vite qu’une nouvelle recrue ».

Chez Yousign, le Design Cost

Yousign, leader dans la signature électronique, ajoute de nouvelles cordes à son arc principal pour agrandir ses solutions business. Sur une échelle plus petite, avec une vingtaine de personnes dans l’équipe produit, l’entreprise a choisi des itérations à 3 mois, avec une revue mensuelle. 

Cela entre dans une méthode de « Design Cost », afin de constater s’il est pertinent d’insister ou pas sur un produit. Christopher Parola souligne la question à se poser : « Qu’est-ce que je veux livrer ? Puis comment je m’organise pour obtenir de la valeur ? Notre pensée produit est basée sur le discovery, la recherche utilisateur. À partir de là, nous pouvons planifier. »

Yousign opère par ailleurs dans une approche capacitaire, avec une ligne de nage par équipe : « Nous avons une équipe structurée classique qui ne traite pas plus de 2 sujets en parallèle. Si bien que si l’on a besoin de budget supplémentaire, il faut libérer de la nouvelle capacité ».

La culture de l’impact doit être suivie à tous les niveaux de l’entreprise

Pour Christopher, inutile de se précipiter pour tout changer, voire jeter aux oubliettes sa roadmap au profit d’une autre méthode en quelques semaines. Lui, qui était auparavant CPO chez MeilleursAgents où il a mis en place des impact teams explique : « Cela a mis un an pour passer de la roadmap annuelle à des deadlines trimestrielles. C’est long ! Et inutile aussi de remplacer la deadline du stakeholder par autre chose », rappelle le VP Product.

Chez Yousign, un gros travail de compétences côté tech et produit a par ailleurs été réalisé pour ne pas avoir un déficit de compétences pour le discovery : « C’est un challenge personnel des équipes qui travaillent dans une amélioration continue. Ce qui explique pourquoi nous sommes dans une culture produit plus que sur des deadlines arbitraires. Avec notre politique de zéro bug, cela suppose aussi d’avoir des équipes cross-fonctionnelles et une hiérarchisation des bugs. »

Au sein de Qonto, le mode d’organisation est défini par les OKR annuels des dirigeants, soit les objectifs et la stratégie, comme le détaille Maxime : « Ils sont traduits dans le domaine des produits à travers un outil d’alignement japonais, l’Obeya (pour « grande salle collaborative qui réunit l’ensemble des informations du produit »), issu de la méthode Lean de Toyota. Cela permet d’accélérer la prise de décisions en y intégrant toute la connaissance. Ce process génère alors des OKR à 6 mois ou orientés produits ». Cette culture découle directement du fondateur de Qonto, Steve Anavi. 

Quand la planification a des vertus …

Parfois, la planification devient un outil de communication à part entière, et comme le rappelle Maxime en citant Eisenhower “Plans are worthless, but planning is everything”. Christopher évoque par exemple la manière dont la roadmap favorise la matérialisation des idées : « Elle s’adapte à l’audience et à ce que nous espérons obtenir après cette période. »

Maxime évoque quant à lui l’interface entre les équipes à travers la méthode Kanban et le planning à flux tiré : « Mon job c’est que mes équipes développent un maximum de valeur avec le minimum d’efforts. Pour y parvenir, les développeurs indiquent à l’équipe produit à quelles dates ils sont disponibles. Ce signal côté produit permet de commencer le discovery et d’apporter la pièce au moment où le développeur est disponible. Le produit doit alors arriver à la date promise. Et le temps qui reste sert à l’amélioration continue »

Quant au fait de savoir si l’absence totale de roadmap est angoissante, Maxime et Christopher s’accordent à dire que l’amélioration des méthodes entraîne beaucoup moins d’incertitudes. Pour cela, Qonto mise sur Notion pour gérer tout le flux de PM : « Cela nous donne une vue Kanban avec les différentes étapes et des indicateurs qui nous alertent en cas de situations anormales ». Chez YouSign, la planification du travail basée sur la conception du produit suffit aussi à gérer le risque ! <

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